vous pouvez lire l'intégralité de ce qui est déjà paru dans
- A LIRE à gauche
5
Un dialogue s'est instauré. Un curieux échange de langage parlé de Marie et
écrit pour moi.
Marie parle beaucoup avec les yeux et sur ce point je lui ressemble. Mes yeux et mes
mains sont depuis aussi loin que j'ai des souvenirs les seuls moyens de m'exprimer.
Personne ne m'avait tendu ainsi crayon et papier pour entrer en contact avec moi. Je
subissais le refus, le rejet de la différence.
Avais-je parlé un jour ? Cette question me torture.
Qui m’a appris à lire et écrire ?
Quelques jours après mon arrivée chez Marie, elle me conduit chez son vieux
docteur.
C'est le docteur LAURENT, le médecin de famille. Depuis la naissance de Marie, il
avait vu passer bien des événements dans la vie de la petite, comme il l'appelle.
Naissances, maladies, morts, se sont succédées à un rythme accéléré durant les vingt
dernières années. Marie m'a préparé à cette visite, ce n'est que pour la rassurer, une formalité.
- Ce docteur est gentil, tu
verras.
La maison du docteur LAURENT, je la découvre au milieu d'un enchantement de verdure.
Grande, claire, ouvrant de larges baies sur un luxuriant jardin à l'anglaise. Des chants d'oiseaux fusent de partout. Ils sont dans le jardin, dans
la maison. J'écarquille les yeux car je connais bien les oiseaux des champs des jardins et des forêts mais ceux du docteur me sont inconnus. La bouche ouverte, je regarde les couleurs vives,
j'écoute leurs trilles et leurs langages venus de tous les continents.
Au détour d'une d'une allée dans cette entrée qui ressemble à une serre enchantée,
un petit homme arrive en trottinant. Cheveux neigeux, barbe de même, encadre un doux visage rubicond. Derrière des lunettes rondes à la monture d'acier, des yeux bleus très vifs et espiègles me
scrutent avec attention. Un plissement de l'oeil droit m'avertit que je l'intrigue un peu.
- Bonjour, petite, alors voilà la garçon dont tu m'as parlé.
Quel gaillard, je vois que tu le
soignes bien.
- C'est Julien, Docteur.
- Approches Julien. Suis-moi, nous retraversons cet oasis de verdure, une certaine
moiteur colle mes cheveux, j'ai peur mais tout autanti émerveillé. Tout me plaît, le docteur et son environnement. Il m'entraine à sa suite vers son cabinet
D'une manière douce et précise, il scrute, palpe, écoute. Il s'attarde sur ma gorge
et mes oreilles.
Il note ce que Marie peut lui apporter comme détails et déchiffre ce que je lui
écris.
Difficile de dire, si j'ai parlé, si je me souviens avoir parlé, si j'ai eu mal dans
la gorge, aux oreilles. Avant Marie c'est le néant total, aucun souvenir. Avec un diapason il confirme que j'entends bien. D'ailleurs à mon visage attentif aux cris des oiseaux, il e le savait
déjà.
Alors il soupire et exprime ce que moi autant que Marie pensons, puisque j'entends,
c'est sans doute un choc émotionnel qui a provoqué mon silence. Mais aussi cet amnésie.
Un autre choc lui rendra peut être la voix. C'est la seule chose à
attendre.
Il rassure Marie.
- Ne t'inquiètes pas, Julien est en pleine forme.
Sa mémoire reviendra, tu verras. Sois
patiente.
En attendant, il a l'air intelligent,
si tu veux le garder auprès de toi, fais
lui apprendre un bon
métier.
- Quel âge peut-il-avoir ?
- Je dirai dans les 16 ans, il est grand, ses mains sont robustes, les attaches bien
que fines sont biens fixées, les cartilages souples prouvent qu'il grandira encore. Mais il est déjà bien grand. Tu es rassurée ?
Marie les yeux plein de bonheur sourit au vieux docteur et me prend par la
main.
Les années ont passés de la tendre complicité est né un amour grandissant chaque
jour pour Marie, notre vie était ensemble c’est tout … j’appris un beau métier, un métier qui dès que j’ai posé les yeux dans un atelier d’ébéniste
m’a paru évident, un terrain connu ………. Et puis un jour …